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20 août 2006

Le mystérieux «service de renseignement étranger»

Hier, la presse française, c'est-à-dire une dépêche de l'AFP soigneusement recopiée, nous informait ainsi: «Tentative d'attentats en Allemagne: l'homme arrêté vient du Liban».

La dépêche de l'AFP, non «traitée», est disponible par exemple sur Cyberpresse. Un version légèrement réécrite est proposée par le Figaro. Dans les deux cas, la source de l'information est la même: un magazine allemand nommé Focus.

Entre la version AFP et la version Figaro, il y a cependant une information qui a disparu; la version Figaro a supprimé un court paragraphe présent dans la dépêche de l'AFP:

Selon Focus, il a été arrêté grâce à des «indices concrets émanant d'un service de renseignement étranger» non précisé.
Comme je suis un blogueur consciencieux et allemandophone, je suis allé vérifier sur le site de Focus. L'article sur lequel est basée la dépêche de l'AFP est le suivant: «Zugriff am Imbissstand» (pour le lecteur qui voudrait creuser le sujet: une échoppe à Imbiss, à Berlin, c'est exactement comme une sandwicherie à falafels à Beyrouth, mais avec des frites à la place du pain arabe, une saucisse à la place des falafels, et de la sauce au curry à la place du tarator). Le passage incriminé est:
Präzise Hinweise eines ausländischen Nachrichtendienstes führten zu seiner Identifizierung.
Comme le lecteur polyglotte peut le constater, la traduction de l'AFP est fidèle.

Le Figaro source son article «avec AFP» et se repose nommément sur le magazine allemand pour affirmer sans autre vérification:
il est vraisemblablement membre d'un réseau islamiste inconnu jusqu'ici des autorités, selon le magazine Focus.
Pourquoi alors cacher à ses lecteurs cette «information» pas du tout anodine, exposée dans le même article, au sujet de l'aide d'un «service de renseignement étranger»? Mystérieux service capable d'identifier un individu de type... hum... islamo-libanais sur le territoire allemand.

Je vous livre cette autre «piste»: voici un extrait d'un article du journaliste allemand Jürgen Elsässer, au sujet du «complot terroriste» en Grande-Bretagne (l'autre grand pays européen au gouvernement parfaitement atlantiste):
Mais les journaux à sensation du groupe Springer en Allemagne nous fournissent une autre version, qui fait intervenir le Mossad comme source supplémentaire. « Baalbek, début août : un commando israélien s’empare d’un hôpital. Le but initial est de débusquer des terroristes du Hezbollah mais - si l’on en croit des experts britanniques - lors de cette opération des agents des services secrets israéliens seraient tombés sur trois ordinateurs. Les disques durs contiennent des informations sur plus de 20 cellules terroristes en Angleterre. Tel Aviv, dimanche 6 août : au siège du Mossad tombe une information urgente envoyée depuis Islamabad : Al Qaïda vient de donner l’ordre à ses terroristes en Angleterre de se préparer à agir !… Peu de temps après le chef du Mossad informe son homologue des services secrets MI6… »

L’information qui sous-tend cet article est claire : l’agression sanglante et contraire au droit international menée par Israël contre son voisin a permis d’empêcher un terrible bain de sang en Europe.
Alors, c'est qui, ces «ausländischen Nachrichtendienstes» anonymes cités par Focus? Le Figaro juge-t-il Focus crédible pour dénoncer un «réseau islamiste inconnu», mais totalement farfelu, dans le même article, concernant un service de renseignement également inconnu? Selon quel critère s'est opérée cette sélection?

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Allemagne

Un terroriste libanais capturé à Kiel

MARCEL LINDEN
© La Libre Belgique 2006
Mis en ligne le 21/08/2006
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L'étudiant aurait placé les bombes qui n'ont pas explosé dans des trains régionaux. La traque se poursuit contre son complice en fuite. «La menace terroriste n'a jamais encore été aussi proche en Allemagne», selon le ministre Schäuble.


AP

CORRESPONDANT EN ALLEMAGNE

Trois semaines après les attentats à la bombe manqués dans deux trains régionaux en Rhénanie, la police a arrêté, à Kiel, l'étudiant libanais Youssef Mohamad E. Il a pu être clairement identifié grâce aux traces ADN et empreintes digitales trouvées sur les machines infernales. «La menace terroriste contre l'Allemagne n'a jamais encore été aussi proche», a averti le ministre CDU de l'Intérieur Wolfgang Schäuble.

«Tuyaux étrangers»

Le soulagement est général après le coup de filet réussi. Vendredi, la police criminelle fédérale BKA avait pour la première fois confirmé l'hypothèse de l'attentat terroriste en publiant des images de vidéo-caméras de la gare centrale de Cologne: elles montraient deux jeunes aux cheveux foncés et à la physionomie orientale traînant derrière eux des coffres. Samedi, à 4 heures du matin, en gare de Kiel, la police arrêta l'un deux. Youssef, âgé de 22 ans, était sur le point de décamper avec le train régional de 3h55 pour Hambourg. En sortant d'un petit restaurant turc dans la gare, il fut terrassé par un commando spécial. L'avocate fédérale Monika Harms, qui a en charge la lutte contre le terrorisme, a parlé vaguement «d'informations» qui auraient mené à son arrestation. Le magazine «Focus» parle, lui, «de tuyaux précis d'un service de renseignements étranger». On n'a pas de traces de son complice.

Le 31 juillet dernier, les bombes auraient dû exploser simultanément à 14 h30 au moment où les deux trains régionaux s'approchaient des gares de Coblence et de Dortmund. Les malfaiteurs les avaient placées à bord des trains au moment où ceux-ci se croisaient à Cologne et étaient arrêtés face à face sur les quais 3 et 4 de la gare centrale. Selon la BKA, une «erreur artisanale» aurait empêché les bombonnes d'exploser; on croit savoir qu'elles ne contenaient pas le bon mélange détonant. Des artificiers de la police neutralisèrent les bombes à Coblence et Dortmund.

Longtemps, les autorités ne voulurent pas exclure l'hypothèse d'un chantage criminel contre la compagnie Deutsche Bahn comme tel avait été le cas à Dresde en 2003. Si les bombes avaient explosé, elles auraient pu tuer de nombreux passagers. Il faut toutefois noter que, contrairement aux attentats de Madrid et de Londres commis aux heures de pointe dans des trains bondés, les deux trains allemands étaient presque vides en début d'après-midi. Et les terroristes ne voulaient pas sacrifier leur propre vie.

«Etudiant médiocre»

Autre différence: alors que les terroristes islamistes de Londres sont nés dans le pays, Youssef était un Libanais arrivé à Kiel il y a deux ans pour y étudier la construction électronique. L'un de ses professeurs, Jürgen Müller, qui lui enseignait la physique, a confié à «Der Spiegel» qu'il était un étudiant médiocre. Après coup, il est soulagé: «S'il avait mieux fait attention, les bombes auraient explosé.» L'avocate fédérale pense que les deux terroristes font partie «d'un groupe ayant une structure durable» en Allemagne.

A la cité étudiante Edo-Osterloh-Haus, où Youssef habitait au premier étage, l'étonnement est général. Un étudiant polonais le qualifie de «type normal, aimable, inoffensif». D'autres disent qu'il était un sunnite très croyant qui recevait beaucoup de visiteurs arabes et nord-africains. Dans son logement, un lit était destiné à un Marocain qui n'est pas apparu. Etait-il le complice? La police ne le dit pas. Le frère de Youssef aurait été tué au Liban pendant l'offensive israélienne. Mais, objectent des musulmans modérés de Kiel, pourquoi aurait-il alors voulu se venger sur des Allemands?