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11 août 2006

Nous sommes tous des chiites allemands

Alors qu'une partie de la presse nous refait le coup de la guerre des civilisation («Les chiites fous du Parti de Dieu», Libération, 15 juillet 2006), Le Figaro a publié en fin de semaine dernière un reportage plutôt émouvant. Je pense que le titre est très mauvais («Les chrétiens de Syrie applaudissent le Hezbollah», mais l'article expose une identité chrétienne-syrienne tout à fait intéressante et originale, très loin des stéréotypes paranoïaques que nous imposent des médias proches d'une minorité de chrétiens libanais. Peut-être la lecture de mon billet sur l'introduction de «L'ethno-politique au Moyen-Orient» sous le mandat français pourra-t-elle, dans cette optique, vous renseigner.

Pour revenir à l'article du Figaro (disponible en ligne), en voici les derniers paragraphes:

Le prêtre [chrétien de Syrie], parfaitement francophone, se désole de ce qu'il considère comme l'ignorance occidentale des réalités religieuses orientales. «Les musulmans ne sont pas nos ennemis. J'entretiens des amitiés profondes avec des cheikhs, ce que je souhaite à tout prêtre. Vous voyez ma montre? Elle m'a été donnée par sa femme en souvenir de mon meilleur ami, le plus grand cheikh syrien, mort récemment. Le terrain sur lequel a été bâtie cette église a été vendu par un musulman à moitié prix, puisqu'il s'agissait d'y construire un lieu de culte.»
En Syrie comme au Liban, les chrétiens montrent leur solidarité avec les réfugiés libanais chiites. Samedi, la Mercedes noire du patriarche grec-catholique Grégoire III, suivie de celle du nonce apostolique, s'arrête dans la cour poussiéreuse d'un monastère en construction à Sednaya, dans la montagne. La chrétienté syrienne exprime ici sa force et sa splendeur. Le soir venu, des croix lumineuses de plusieurs mètres de haut s'allument sur les sommets, signalant des églises cossues décorées d'icônes en or. Dans la cour du monastère, le patriarche vient réconforter plus de 500 réfugiés de la Bekaa, la plupart chiites. Que pense-t-il du Parti de Dieu? «Le Hezbollah, c'est le Hezbollah, dit Grégoire III, en français lui aussi. Je soutiens le droit des gens à obtenir justice.» Pour le prélat, «l'attaque contre le Liban est une échappatoire. Le fond du problème, c'est le conflit israélo-palestinien, que les grandes puissances devraient résoudre». Et le patriarche d'entonner l'hymne national libanais, entraînant avec lui des dizaines d'enfants réfugiés accrochés à sa robe.
Ghassan Zreik, un mécanicien qui campe avec onze membres de sa famille, a entendu le patriarche répéter sa déclaration en arabe : «Nous sommes tous chiites ici ; nous le remercions de ses propos sur le Hezbollah.» Le soir, les réfugiés remercieront à leur façon. À Sednaya, les scouts et les écoliers défilent aux flambeaux pour marquer la fête de la Transfiguration. Les musiciens gardent leurs instruments sous le bras en signe de deuil pour le Liban. Parmi les jeunes chrétiennes en justaucorps moulants et les jeunes gens coiffés au gel, une cinquantaine de réfugiés – femmes portant le foulard islamique et hommes barbus – marchent, eux aussi, en l'honneur du jour où Jésus est apparu en habit de lumière aux apôtres Pierre, Jacques et Jean.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Quand on veut faire peur aux enfants, on leur raconte des histoires d'ogres. Maintenant quand on veut terrifier les adultes, on leur montre l'image du barbu qui va venir les exploser en avion. Quand une opinion à l'échelle mondiale se met à douter et à dénoncer les massacres, faut les calmer. Alors, on fabrique des histoires pour attiser la peur, le choc des civilisations, guerre de religions et ainsi on peut continuer gentiment à massacrer, au nom de la sécurité, de votre sécurité. La guerre psychologique, c'est bien pervers.
Au Proche-Orient, l'Arabe chrétien priera Allah, le Chiite priera Allah et le Sunnite priera Allah pour que le massacre cesse.