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12 mai 2008

Joumblatt est-il la cible?

Toujours aussi peu d'informations précises nous parviennent en France.

Dans l'après-midi d'hier, les combats (décrits comme extrêmement violents) se sont déplacés dans la montagne druze, fief de Walid Joumblatt et de sa milice du PSP. En fin d'après-midi, les forces du PSP ont rendu leurs armes à l'armée, de la même façon que les milices Hariri avaient rendu leurs armes à l'armée à Beyrouth.

– Il est très difficile de savoir précisément quelles sont les forces impliquées dans ces combats «extrêmement violents». Les sites Web et médias de l'opposition se contentent de mentionner «les forces de l'opposition», ce qui est pour le moins imprécis.

Une dépêche entraperçue sur le site du Tayyar semble nommer ces forces de l'opposition: les forces du Parti démocratique libanais de l'émir druze Talal Arslan, celles du parti Tawhid (druze) de Weaam Wahhab et celles du PSNS (laïc). Une autre dépêche indiquait que le Hezbollah niait la présence de ses propres forces dans la montagne druze.

Je suis assez circonspect quant à ces affirmations.

  • Je me demande comment, réellement, ces trois milices minoritaires seraient capables seules de défaire le PSP en quelques heures dans la montagne druze. Surtout à la suite de combats «extrêmement violents».
  • Il y a quelques jours, trois membres du Hezbollah ont été enlevés et tués et les corps de deux d'entre eux retrouvés dans cette région.
  • Franklin Lamb livrait jeudi son témoignage:
Cet observateur est surpris de voir et d’apprendre que le Hezbollah et Amal se sont également déployés sur le Mont Liban. M’approchant d’un secteur druze, près de l’hôpital Kamal Jumblatt à Choufeit - il est près de 1h de l’après-midi -, je redescends par une petite rue pour donner un coup de téléphone dans une boutique, faisant office de bureau de téléphone. Je suis choqué d’y voir environ 80 combattants, lourdement armés. «Oh!» me dis-je, «finalement, les voilà les milices de Jumblatt». Comme je me dirige vers la boutique, plusieurs hommes armés s’approchent de ma moto - qui est bien connue à Dahiyeh. «Habibee!» s’écrie un jeune homme en m’entourant de son bras libre. En fait, il s’avère que c’est un de mes voisins de Harek Hreik. «Que faites-vous ici avec la PSP (milice druze)?» je lui demande, sans conviction. «Non, non, nous sommes tous du Hezbollah et d’Amal ici!»
– Hier matin, sur la télévision aouniste (OTV), Charles Ayoub (fondateur du quotidien Ad-Diyar et membre du PSNS – que l'on peut donc supposer être proche de l'analyse du Hezbollah) expliquait son point de vue: selon lui, si la réunion des ministres de l'intérieur arabes ne parvenait pas à un accord pour un gouvernement d'union nationale au Liban, alors les troupes de Joumblatt, lourdement armées, mèneraient une contre-offensive et descendraient de la montagne pour reprendre Beyrouth.

Peut-on supposer que le Hezbollah, dans sa propre logique, a hier agit «préventivement», craignant une contre-offensive d'envergure menée par Walid Joumblatt alors que la réunion des ministres arabes s'annonçait déjà infructueuse?

En tout cas, l'action s'inscrit encore dans la logique présentée par l'opposition: désarmer les milices de Hariri et de Joumblatt à travers le pays et immédiatement transférer le contrôle à l'armée.

– Aujourd'hui, des analystes sur OTV suggèrent que le but poursuivi par le Hezbollah serait de se débarrasser définitivement de Joumblatt. C'est le seul homme politique du 14 Mars nommément mis en cause dans la déclaration de Hassan Nasrallah (Saniora ne serait qu'un laquais aux ordres de Joumblatt), et la milice du PSP est généralement présentée comme la seule réellement capable d'actions d'envergure.

Une analyse entendue ce matin sur OTV suggère que le but du Hezbollah serait de remplacer Walid par son fils Taymour Joumblatt (qui vit en France) à la tête du PSP. En décembre dernier, le site Elaph citait l'agence de presse iranienne qui avait publié une interview (non confirmée) dans laquelle Taymour Joumblatt critiquait violemment son père.

Une nouvelle exigence s'est-elle ajoutée aux revendications de l'opposition: que Walid Joumblatt se retire de la vie politique libanaise?

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Très intéressant. En même temps, comment analyses-tu la demande de Jumblatt à son rival druze Arslane d'intercéder auprès du Hezbollah pour stopper l'offensive? Ca ne semble pas cadrer avec la puissance supposée des milices PSP. De même la déclaration de Jumblatt appelant à régler de façon pacifique le différend - ce n'est pas le Jumblatt qu'on connaît, et certainement pas le Jumblatt qui serait en position de force...

Lorsque Imad Mughniyeh fût tué, je me suis rappelé la phrase de Jumblatt appelant, à Washington, à des attentats à la voiture piégée à Damas et me suis dit "dead man walking"... En même temps, vu son alliance récente avec les USA, tout attentat serait très coûteux, sans parler des répercussions politiques. Je doute que le Hezbollah puisse se permettre le coût politique d'une mort violente de Jumblatt.

PS: très heureux de ton retour, Nidal!

Anonyme a dit…

Bonjour,
auriez vous des sources en français ou en anglais pour comprendre ce qui s'est passé vraiment au Chouf et à Aley. Je lis aujourd'hui un texte de Michael Young qui évoque un combat commun des militants du PSP et de Arslan contre les miliciens du Hezbollah. Ce n'est pas vraiment ce que j'avais compris : au contraire, il me semblait que les miliciens d'Arlsan et du PSP s'étaient combattus les uns les autres, avant un cessez le feu (écrit ce jeudi 15 mai)
Ever